La persévérance bruyante de l’UNAPL pour associer à la concertation sur le projet de loi EL KHOMRI le secteur des entreprises libérales, n’aura pas été vaine, puisqu’elle a été finalement reçue par le Premier ministre ce jeudi 10 mars 2016. Il est normal et légitime qu’un secteur dynamique, constitué pour l’essentiel de TPE/PME pourvoyeuses d’emplois de proximité dans tous nos territoires, avec près d’un million d’entreprises pour 2 millions d’emplois, soit associé aux discussions.
Le projet de loi EL KHOMRI contient différents points positifs, susceptibles de constituer des avancées, pour peu qu’ils ne soient pas dénaturés et qu’ils puissent être dimensionnés pour répondre aux attentes des TPE/PME, sans risque de les pénaliser.
Parmi les mesures positives, l’UNAPL retient :
- L’ouverture aux entreprises de moins de 50 salariés de la possibilité de conclure des conventions individuelles de forfait annuel en jours ou en heures. Il s’agit d’ailleurs d’une mesure proposée par l’UNAPL au Premier ministre en juin 2015.
- La barémisation des indemnités de licenciement, à condition toutefois que le plafond tienne compte de la réalité des TPE/PME. Celui de 15 mois envisagé actuellement est déjà très haut à l’échelle d’une petite entreprise, le relever serait inconcevable.
- La mise en place d’un service d’appui aux entreprises de moins de 300 salariés, encore qu’on ne fait là qu’accompagner la complexité, plutôt que de faire l’effort de simplification attendu.
- La mise en place d’accords-types de branche pour les entreprises de moins de 50 salariés
- La facilitation du licenciement pour motifs économiques, qui ne doit pas concerner que les grands groupes mais doit aussi pouvoir s’appliquer aux TPE/PME lorsqu’elles perdent des marchés.
- L’intégration des indépendants dans le CPA à condition, toutefois, que celui-ci soit simple et se limite strictement, dans un premier temps au CPF (Compte Personnel de Formation) sans y inclure le C3P (compte personnel de prévention de la pénibilité) qui reste, à ce stade, une « usine à gaz », et encore moins le compte épargne temps que les TPE, qui faut-il le rappeler n’ont pas de DRH, ne sont pas en mesure de gérer.
Malheureusement, ces mesures positives sont éclipsées par le poids et la gravité de celles négatives et pénalisantes pour les TPE/PME. Il s’agit, notamment :
- De l’oubli délibéré du niveau multiprofessionnel dans le texte alors que les organisations patronales concernées, au premier rang desquelles l’UNAPL, pèsent 30 % de l’emploi dans le pays. Cantonnées en 2ème division » par des artifices, elles sont exclues et privées de parole sur les sujets essentiels tels que la restructuration de branches, le développement du télétravail, et la concertation sur le projet de loi EL KHOMRI, si l’UNAPL, la FNSEA et l’UDES d’un côté, l’UNAPL et l’UPA de l’autre n’avaient pas uni leurs efforts pour se faire entendre.
- Du manque de courage par la sanctuarisation des grands principes du Droit du Travail en application du rapport Badinter, qui fige l’évolution du Code du Travail, là où les chefs d’entreprise attendaient de la souplesse et de la modernité.
- De la généralisation de l’accord d’entreprise, qui deviendrait la norme de négociation au détriment de l’accord de branche pourtant essentiel dans le secteur des TPE, notamment Libérales. Ce choix uniquement pensé par et pour les grandes entreprises ne sera, non seulement pas créateur d’emplois dans ces dernières, mais sera totalement contreproductif pour les TPE qui assurent encore 70% des emplois en France. Une fois de plus, vouloir transposer aux TPE les méthodes des multinationales créerait une situation qui irait à l’encontre du but recherché, à savoir développer l’emploi.
Enfin, summum des mesures négatives, celle qui consiste à revoir la représentativité patronale (article 20) afin de l’asseoir sur le nombre de salariés, et non plus sur le nombre d’entreprises est totalement inacceptable. Cette disposition revient à marginaliser le secteur des TPE/PME qui est pourtant le principal pourvoyeur des emplois de demain. En outre, cette « OPA » d’une seule organisation représentant les grandes entreprises du CAC 40, n’a aucune assise juridique puisque le Conseil constitutionnel, statuant sur une QPC posée par le MEDEF pour tenter de contourner la loi, n’a pas fait droit à sa demande. Au contraire, il a suivi la position alors exprimée par le 1er Ministre dans ses observations formulées en date du 1er décembre 2015, et produit dans sa réponse un solide argumentaire en faveur d’une représentativité assise sur le nombre d’entreprises. En outre, rien ne justifie que la démocratie et le pluralisme s’arrêtent aux portes de la représentativité patronale
L’UNAPL a demandé au Premier Ministre la suppression de cette disposition scélérate. Elle combattra l’ensemble du projet de loi aussi longtemps que cette mesure y restera, et que d’autre part, les propositions qu’elle comporte ne seront pas adaptées aux TPE/PME.